Pomme.
-Pst, c'est bon.
Le patron est parti.
Tu peux rallumer, s'il te plaît ?
Il est soucieux, tu ne trouves pas ?
Carotte.
-Oui, il faut dire qu'on n'a vu personne, aujourd'hui, à part Mme Julienne.
Banane.
-Mais bon, il faut les comprendre, les gens.
Ils veulent du choix ou bien du chic.
Déjà, "Aux primeurs", ce n'est pas très original, comme nom, pour le magasin, non ?
On n'a qu'à trouver une bonne pub.
Melon.
-J'en ai une bien.
"Aux primeurs, on ne se fait pas bananer."
Ou alors : "Aux primeurs, les carottes sont cuites."
Ou bien : "Aux primeurs, on tombe dans les pommes."
Carotte.
-Euh, il est...
Ou bien il est...
Pomme.
-C'est une bonne idée de choisir une expression de la langue française pour faire une bonne publicité.
Mais au sens figuré, ces expressions ne sont pas vraiment à notre avantage.
Un cœur d'artichaut est trop souvent amoureux.
Tu as un petit pois dans la tête si tu n'es pas futé.
Tu as du sang de navet quand tu n'es pas courageux.
C'est la fin des haricots, rien à espérer.
Carotte.
-Tu n'as plus un radis, c'est tu n'as plus de sous.
Tu racontes des salades, c'est que tu mens.
On te fait attendre longtemps, tu fais le poireau.
Poireau.
-On parle de moi ?
Carotte.
-Enfin, te voilà, toi.
Pas trop tôt.
On a un souci, Poireau.
On cherche un bon slogan pour faire revenir les clients aux primeurs, et on ne trouve pas une seule expression avec des légumes qui soit positive.
Poireau.
-Mais c'est la contradiction suprême de la langue française.
Celui qu'on traite de légume, en général, il n'est pas bien en forme.
Alors que nous autres, légumes, on est pleins d'eau pour hydrater le corps humain qui en a bien besoin, de fibres, pour mieux digérer, par exemple, de minéraux, pour...
Non, on laisse tomber, on verra ça un autre jour.
Et, et, et...
Eh oui, de vitamines, pour avoir la pêche.
Melon.
-Alors, alors, on ouvre une poissonnerie ?
C'est ça ?
Carotte.
-Oh non, mais il est trop...
Mais attends, "avoir la pêche", mais c'est bon, ça !
"Aux primeurs, on a la pêche."
Banane.
-Yo man, la pêche et la banane.
Tous ensemble.
-Aux primeurs, on a la pêche, la pêche, la pêche.
Aux primeurs, on a la pêche, la banane aussi.